Peupliers noirs (Populus nigra) et saules dans la ripisylve de la Durance
POP-MICROCLIM

Contribution du microbiote racinaire à l’adaptation des arbres aux contraintes climatiques : étude de cas sur le peuplier noir.

Le projet PopMicroClim, financé par INRAE, vise à explorer si le microbiome racinaire de l'arbre peut être utilisé pour améliorer la résistance des arbres au changement climatique et à identifier les micro-organismes impliqués dans l'amélioration de ce caractère. Dans l’affirmative, les résultats pourraient être utilisés pour tenter de concevoir des inocula microbiens susceptibles d'améliorer la résistance des jeunes plants et des arbres au changement climatique.

OBJECTIFS

Les forêts couvrent 31 % du territoire métropolitain français et ont un rôle écologique, économique et sociétal important. Elles sont très vulnérables aux changements globaux, en particulier l'augmentation de la température et la diminution des précipitations. Différentes stratégies de gestion sylvicole peuvent être envisagées pour faire face aux changements climatiques futurs et atténuer les stress abiotiques ou biotiques qui affecteront les arbres. Aujourd’hui, il est envisageable de choisir des essences d'arbres les plus adaptées/résistantes aux prévisions du climat futur en adéquation avec la fertilité des sols et leur réserve en eau.

L'utilisation de micro-organismes bénéfiques pourrait constituer un levier supplémentaire. En effet, il est maintenant bien démontré que les arbres sont massivement colonisés par des communautés complexes de micro-organismes, appelés le microbiome, qui contribuent fortement à la nutrition et à la santé de leur hôte.

Le peuplier noir face aux changements de l'environnement

Peupliers noirs (Populus nigra) et saules dans la ripisylve de la Durance
© © INRAE - P. Frey

Les analyses de diversité génétique et de plasticité phénotypique suggèrent l’existence d’un pool génétique large qui pourrait faciliter l’adaptation des populations dans le contexte de modifications climatiques. D’autre part, nos résultats indiquent que les peupliers noirs se développant dans la zone méditerranéenne et la zone océanique ne répondent pas de la même manière à des changements de l’environnement, chaque population ayant développé des stratégies distinctes d’adaptation à un changement des conditions environnementales. Les populations originaires de la Loire répondent essentiellement par des modifications de leur morphologie tandis que les populations issues de la Drôme répondent d’avantage par une adaptation de leur physiologie. Enfin, la transplantation de la provenance Loire plus septentrionale dans un environnement méridional a donc conduit à une croissance plus forte, en l'absence de contrainte hydrique. D’un point de vue pratique, cela pourrait suggérer que les modifications climatiques futures, notamment l’augmentation des températures, pourraient favoriser les populations septentrionales de peuplier noir, si le stress hydrique reste limité.

Concernant le microbiote, nous avons montré que celui-ci différait nettement du microbiote d’autres espèces de peupliers déjà étudiées. Sa composition est très fortement influencée par le sol (sédiment) dans lequel poussent les plantules. Les résultats laissent à penser qu’il est possible, d’une part, de transférer un microbiote non natif, potentiellement plus performant, à des plantules  en utilisant le sol comme inoculum et d’autre part de prédire le microbiote que vont acquérir des plantules semées dans une zone non-native en connaissant le microbiote local. Enfin les résultats suggèrent que la résistance au stress hydrique du peuplier noir pourrait en partie être conditionnée par son microbiote et que le champignon ectomycorrhizien du genre Geopora pourrait améliorer cette résistance. Ces résultats préliminaires encourageant nécessitent maintenant une validation expérimentale pour démontrer que les membres du microbiote identifiés ont bien un rôle dans l’amélioration ou la détérioration des traits physiologiques étudiés du peuplier noir.

Écologie microbienne et écophysiologie de l'arbre

Ces résultats ont été obtenus à la faveur d’une approche expérimentale intégrée mêlant écologie microbienne et écophysiologie de l'arbre, deux expériences sont réalisées conjointement : dans la première, les des jeunes plants sont soumis à un stress hydrique, dans la seconde, les plantules sont confrontées à un changement climatique plus important en étant transplantés dans deux régions de France aux climats contrastés (Drôme et Loire). Au cours de ces expériences, la croissance de chaque plantule, le développement de son système racinaire et aérien, sa capacité à absorber et à transférer l’eau, ainsi que son microbiote sont caractérisés et comparés.  L'existence des liens entre la présence de certains micro-organismes et le développement des plantules a ainsi été exploré.

Les premières séries d'expériences ont été échantillonnées en novembre 2017 et les données sont en cours de traitement. Une deuxième série d’expériences récoltées au cours de l'été 2018 est en cours d'analyse.

Les premiers résultats mettent en lumière l’impact significatif de l’arbre et des facteurs environnementaux sur la composition et la structure taxonomique et fonctionnelle du microbiote racinaire ainsi que la nécessité de considérer l’arbre et son microbiote comme un « méta-organisme » à part entière.

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Contacts

Aurélie Deveau

UMR IAM, Centre INRAE de Grand-Est Nancy

Marc Villar

UMR BioForA, Centre INRAE du Val de Loire